Le Testament d’Orphée – Jean Cocteau (Réalisateur et scénariste)

“Un artiste peint toujours son propre portrait.” – Cégeste

Éclectique et créatif, Jean Cocteau a ravi le public avec sa poésie.

Poésie de la littérature, de la peinture, du dessin, du théâtre et du cinéma.

Pour ce dernier médium, des films qui ont séduit le monde. Dont il a écrit le scénario; ou écrit et réalisé. Et parmi ceux qu’il a dirigés, des classiques comme Le sang d’un poète, La Belle et la Bête et Orphée qui ont ravi le public. Concluant finalement sa carrière de cinéaste avec Le Testament d’Orphée. Chance pour lui d’honorer son travail, ses amis et ses collègues. Avec la collaboration technique de Claude Pinoteau; qui avait travaillé avec lui sur Les Parents Terribles et d’autres productions de Cocteau.

Mais dans cette histoire, l’Orphée de ce film n’est pas le protagoniste incarné par Jean Marais. Au lieu de cela, c’est Cocteau lui-même. Qui voyage au-delà du temps et de certains paysages méditerranéens. A la rencontre de ses amis, de ses oeuvres et de quelques comédiens. Disant au revoir à ses amis et au public. Comme s’il savait que son temps sur Terre allait bientôt se terminer. Un testament ironique et émouvant devant nous ; considérant que c’était en effet son dernier film.

Maintenant, en tant que film lui-même, il n’y a pas d’intrigue dramatique. On voit Jean Cocteau rencontrer des amis et des artistes qui l’ont impressionné. Picasso, Charles Aznavour, Yul Bryner ou encore Jean-Pierre Léaud. Et pour nous guider dans ce film, le poète est accompagné de Cégeste ; le même Cégeste d’Orphée. Interprété par Edouard Dermit, le même acteur du film; et aussi l’amant de Jean Cocteau. Ce qui permet au poète et à son petit ami de travailler ensemble. De partager un moment important de complicité lors de cette production.

Aventure où apparaît également la Princesse et Herteubise du film Orphée. Une scène cruciale qui révèle ce qui leur est arrivé après la fin de l’histoire. Une fin que je ne révélerai pas tant elle est tragique et douce-amère. Mais cela concorde avec ce que j’avais toujours prédit en regardant le long métrage Parallèlement à cela, nous apprenons comment la nouvelle vie d’Orphée et d’Eurydice a évoluée dans leur univers parallèle. Et de cette fin, je ne m’y attendais pas.

Dans ses images en noir et blanc, le film présente de beaux endroits où Cocteau a travaillé et vécu, comme dans le sud de la France. Il présente également ses dessins. Illustrations très influencées par la mythologie grecque. Révélant des parties de lui-même; ce qui va dans le sens de ce qu’il a toujours dit. Que même si un ou une artiste fait de la peinture, du cinéma, du théâtre ou de la poésie, il ou elle dépeint toujours son propre autoportrait.

Et à travers d’astucieux effets spéciaux tels que des séquences de films inversés, Cocteau fait tout pour nous épater. Même chose avec la musique. Pour la bande sonore, George Auric participe à cette dernière aventure. Aux côtés d’autres grands compositeurs classiques comme Wagner, Bach, Haendel et d’autres ; dont les compositions ont été utilisées pour certaines scènes poétiques et tragiques. De nombreux moments émouvants qui restent dans le cœur des spectateurs. Comme la rencontre entre Jean Cocteau et Œdipe, joué par Jean Marais. La muse du poète, son âme sœur. Fait d’une manière très particulière; faisant référence à la façon dont ils se sont rencontrés pour la première fois.

Et puis il y a ce moment ; le plus choquant.

Où Minerve poignarde Jean Cocteau dans le dos avec une lance. Un moment très difficile à filmer car apparemment, d’après ce que j’ai lu, Cocteau a insisté pour ne pas être doublé par un cascadeur. Il voulait recevoir la lance au moment où elle le frappait. Une cascade qui a rendu tout le monde nerveux tant il était fragile et vulnérable. Pourtant, il a fait la scène; et ce moment est l’un des plus époustouflants de la filmographie du réalisateur.

Au final, ce film permet à Jean Cocteau de rendre hommage à ses amis, mais aussi de confronter ses détracteurs. Tout ce qu’ils prétendaient à son sujet ; tout ce dont de quoi ils l’ont accusé; et comment il s’est toujours senti mal accueilli sur cette Terre en raison de la cruauté qu’il a subie dans sa vie.

En tant que tel, bien qu’il ne suive pas une intrigue dramatique, il s’agit d’une rétrospective métaphysique d’un poète. Qui sait que le film que nous voyons ici est son dernier. Sa chance de faire ses adieux à tous ceux qui ont vu ses films et ses pièces.

Un beau chant du cygne pour un homme que la presse française et les cliques intellectuelles de l’époque ont toujours traité de vilain petit canard. Alors que le reste du monde le vénérait, influençant des artistes comme Clive Barker et David Lynch ; dont la filmographie a de multiples références au poète français.

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